Du 19 novembre 2002
au 15 février 2003


Masson comme Bataille, comme tous les surréalistes, attache à l’érotisme une dimension particulière : Eros et Thanatos sont inséparables…
D’ailleurs les premiers dessins automatiques de Masson étaient presque tous à contenu érotique, mais sans préméditation. Cette ligne automatique qu’il inventera est l’une des plus originales conquêtes des premières années du surréalisme.

André Breton en découvrant les premiers dessins automatiques d’André Masson déclara : « L’érotisme est la clé de voûte d’André Masson ».

Dans sa première période surréaliste auprès d’Aragon, Leiris, Artaud, Desnos, Max Jacob, Bataille… Il développera de nombreux dessins autour du cérémonial sadien. Dans cette veine, il illustre entre autres le « Con d’Irène » de Louis Aragon, « l’Histoire de l’œil » par Lord Auch (Bataille).

Après l’automatisme pur viendront des thèmes cernés consciemment représentant des jeux d’accouplement, des scènes de violence entre hommes et femmes, des scènes d’enlèvement, de rapt, de viol. « Pendant deux ans, presque sans interruption je peins des massacres, des scènes de sexe organisées autour de la pulsion de mort »

Attiré comme Bataille par la mythologie grecque, Masson lie sa pulsion érotique au mythe « transcriptions historiées de pensées et de désirs profonds ».

En 1934, il s’établit en Espagne où les paysages et soleils aveuglants exaltent ses œuvres. Les couleurs qu’il adopte dans ses tableaux évoquent la passion et le cérémonial théâtral de la tauromachie. En même temps il dessine des insectes anthropomorphiques ou humanisées et des paysages avec des rochers aux formes phalliques et des collines ibériques évoquant les seins des femmes.

De retour en France commence ce qu’il considère comme sa deuxième époque surréaliste où règne la métamorphose et le labyrinthe. La métamorphose où à travers éclosion et germination l’on retrouve par analogies des formes semblables en particulier du sexe féminin.

Le mannequin présenté par André Masson à l’exposition internationale du surréalisme de 1938 en est la preuve immédiate. Ce mannequin à bâillon vert, à bouche de pensée sera probablement la production éphémère la plus spectaculaire de Masson.

Avec le labyrinthe corridor menant à des régions psychiques intimes, Masson explore les entrailles de la Genèse : depuis les terres érotiques jusqu’aux paysages matriarcaux représentant des femmes monumentales assises, genoux entrouverts, le sexe frontal semblant servir d’entrée de ville, d’entrée du monde.

Un autre épisode apparemment anecdotique qui pourtant devait avoir un grand retentissement ces dernières années dans la vie culturelle française se situe vers 1955.

A cette époque, Jacques Lacan avait acquis « L’Origine du monde » de Gustave Courbet, tableau secret commandé en 1866 par un riche amateur Khalil-Bey.

Celui-ci l’avait protégé des regards « innocents » par un panneau, que les Goncourt se souvenaient être un paysage de neige.

Lors de son acquisition Jacques Lacan commanda à Masson un nouveau masque. Ainsi naquit le « Paysage anthropomorphe » qui ne devait quitter « l’Origine du monde » que récemment lors de l’entrée du Courbet dans les collections du musée d’Orsay.