
Masson
comme Bataille, comme tous les surréalistes, attache
à l’érotisme une dimension particulière
: Eros et Thanatos sont inséparables…
D’ailleurs les premiers dessins automatiques de Masson
étaient presque tous à contenu érotique,
mais sans préméditation. Cette ligne automatique
qu’il inventera est l’une des plus originales
conquêtes des premières années du surréalisme.
André
Breton en découvrant les premiers dessins automatiques
d’André Masson déclara : «
L’érotisme est la clé de voûte d’André
Masson ».
Dans sa
première période surréaliste auprès
d’Aragon, Leiris, Artaud, Desnos, Max Jacob, Bataille…
Il développera de nombreux dessins autour du cérémonial
sadien. Dans cette veine, il illustre entre autres le «
Con d’Irène » de Louis Aragon, «
l’Histoire de l’œil » par Lord Auch
(Bataille).
Après
l’automatisme pur viendront des thèmes cernés
consciemment représentant des jeux d’accouplement,
des scènes de violence entre hommes et femmes, des
scènes d’enlèvement, de rapt, de viol.
« Pendant deux ans, presque
sans interruption je peins des massacres, des scènes
de sexe organisées autour de la pulsion de mort »
Attiré
comme Bataille par la mythologie grecque, Masson lie sa pulsion
érotique au mythe «
transcriptions historiées de pensées et de désirs
profonds ».
En 1934,
il s’établit en Espagne où les paysages
et soleils aveuglants exaltent ses œuvres. Les couleurs
qu’il adopte dans ses tableaux évoquent la passion
et le cérémonial théâtral de la
tauromachie. En même temps il dessine des insectes anthropomorphiques
ou humanisées et des paysages avec des rochers aux
formes phalliques et des collines ibériques évoquant
les seins des femmes.
De retour
en France commence ce qu’il considère comme sa
deuxième époque surréaliste où
règne la métamorphose et le labyrinthe. La métamorphose
où à travers éclosion et germination
l’on retrouve par analogies des formes semblables en
particulier du sexe féminin.
Le mannequin
présenté par André Masson à l’exposition
internationale du surréalisme de 1938 en est la preuve
immédiate. Ce mannequin à bâillon vert,
à bouche de pensée sera probablement la production
éphémère la plus spectaculaire de Masson.
Avec le
labyrinthe corridor menant à des régions psychiques
intimes, Masson explore les entrailles de la Genèse
: depuis les terres érotiques jusqu’aux paysages
matriarcaux représentant des femmes monumentales assises,
genoux entrouverts, le sexe frontal semblant servir d’entrée
de ville, d’entrée du monde.
Un autre
épisode apparemment anecdotique qui pourtant devait
avoir un grand retentissement ces dernières années
dans la vie culturelle française se situe vers 1955.
A cette
époque, Jacques Lacan avait acquis « L’Origine
du monde » de Gustave Courbet, tableau secret commandé
en 1866 par un riche amateur Khalil-Bey.
Celui-ci
l’avait protégé des regards « innocents
» par un panneau, que les Goncourt se souvenaient être
un paysage de neige.
Lors de
son acquisition Jacques Lacan commanda à Masson un
nouveau masque. Ainsi naquit le « Paysage anthropomorphe
» qui ne devait quitter « l’Origine du monde
» que récemment lors de l’entrée
du Courbet dans les collections du musée d’Orsay.
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